Sénégal. Pour une loi protégeant les défenseurs des droits humains

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La Constitution sénégalaise prévoit une série de garanties constitutionnelles et législatives pertinentes pour les droits et libertés individuels et collectifs. Les articles 8, 10 et 12 de la Constitution, qui confèrent le droit d’exprimer et de diffuser librement des opinions, et de constituer librement des associations et des groupes économiques, sociaux et culturels ainsi que des sociétés, est d’une importance capitale.

D’une part s’agissant de la liberté de manifestation ou de réunion, il faut souligner que son exercice ne requiert qu’une déclaration préalable adressée à l’autorité administrative à titre d’information.

En cas d’interdiction prononcée par une autorité administrative, les requérants disposent d’une voie de recours en annulation devant la juridiction administrative.

Une gestion concertée de cette question par les acteurs concernés est généralement préférée à son règlement par voie juridictionnelle, ce qui ne permet pas l’émergence d’une jurisprudence sur le contrôle des motifs avancés par l’administration au soutien de sa décision d’interdire certaines manifestations sur la voie publique.

D’autre part, les ONGs rencontrent des obstacles d’ordre administratif pour bien faire leur travail, ce qui constitue un recul sur les acquis du Sénégal en matière de liberté d’association et d’expression.

Le Service International des Droits de l’Homme (ISHR), la Coalition Sénégalaise des Défenseurs des Droits de l’Homme (COSEDDH) et le Réseau Ouest Africain des Défenseurs des Droits de l’Homme (ROADDH) saluons la volonté du gouvernement sénégalais d’avoir accepté plusieurs recommandations du 2e cycle de l’EPU.

Toutefois, nous constatons qu’aucune mesure concrète n’a été prise pour leur mise en œuvre les recommandations acceptées en 2013 par le Sénégal et faites par la Slovénie et l’Espagne, sur les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion, et des droits des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes.

L’arrêté 7580 du 20 juillet 2011 appelé “Arrêté Ousmane Ngom”, qui interdit les manifestations dans certaines parties du centre-ville de Dakar, systématiquement a été invoqué par les autorités pour interdire des manifestations à la place de l’indépendance, c’est le cas de la manifestation de l’opposition organisée, le 9 mars 2018 et devant le Ministère de l’Intérieur du Sénégal, le 4 septembre 2018.

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Nous constatons que le gouvernement utilise une stratégie pour restreindre l’espace civique qui inclut l’arrestation arbitraire et détention pendant une courte durée de leaders d’opinion, créant ainsi un climat de peur et d’autocensure. Depuis 2015, quatre leaders d’opinion et activistes des droits humains ont fait l’objet d’arrestation illégale, même s’ils sont libérés par la suite.

Les manifestations pacifiques de l’opposition sont dispersées à coups de grenades lacrymogènes et des responsables arrêtés avant d’être libérés, il en était de même au lendemain de l’élection présidentielle en février 2019.

La prise en charge de certains aspects de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme est problématique au Sénégal, notamment en ses articles 2 et 12 (al 2). En février 2018, en réponse au rapport annuel d’Amnesty International Sénégal, le Premier ministre Mahammad Boune Abdallah Dionne a publiquement critiqué la société civile lors d’une visite à Gossas, dénonçant Amnesty International pour sa “défense des droits des homosexuels et des lesbiennes”.

Lors d’un entretien accordé à France 24, le Président de la République, allant dans le même sens que son premier ministre qui attaquait les auteurs de la société civile, notamment le Directeur Exécutif d’Amnesty International, avait déclaré sans le nommer que Seydi Gassama” est politisé et gagnerait à rejoindre l’opposition”.

Le 13 novembre 2018, les responsables d’ENDA Tiers Monde, d’OXFAM, d’OSIWA ont été convoqués par les autorités policières dans le cadre d’une enquête ouverte sur les présumés financiers “irréguliers” de Y EN A MARRE. Au même moment les responsables de l’ONG Lead Afrique Francophone avaient été convoqués au Commissariat Central pour un interrogatoire qui a duré cinq (5) heure de temps, avant de les notifier l’abrogation de l’agrément leur permettant d’exercer leurs activités sur le territoire nationale. Cependant nous nous réjouissons que le gouvernement ait restitué l’agrément à Enda Lead Afrique Francophone en début de semaine du mois de mars 2019.

Il n’y a pas de mécanisme de protection national pour les défenseurs des droits de l’homme en danger et une loi relative à la promotion des droits humains et à la protection des défenseurs des droits de l’Homme au Sénégal serait la bienvenue.

Dans le nouveau Code de la presse de 2017, la répression des délits de presse est maintenue avec une aggravation des peines de prison et des amendes, malgré plusieurs déclarations publiques du président de la République.

La France, le Chili, la Suède, le Pérou et la Grèce ont recommandés des actions spécifiques concernant la liberté d’expression et les droits des journalistes en particulier dans ce 3eme cycle de l’EPU – le gouvernement doit maintenant agir. Sur ce plan nous attendons des mesures fortes allant dans le sens de la mise en œuvre de ces recommandations.

Le Service International des Droits de l’Homme (ISHR), la Coalition Sénégalaise des Défenseurs des Droits de l’Homme (COSEDDH) et le Réseau Ouest Africain des Défenseurs des Droits de l’Homme (ROADDH) recommandent :

Au gouvernement du Sénégal de :

  • Créer et maintenir, en droit et en pratique, un environnement propice aux actions de la société civile, conformément aux droits définis par le PIDCP, la Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’homme et les résolutions 22/6, 27/5 et 27/31 du Conseil des droits de l’homme ;
  • Davantage garantir la liberté d’association, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique ;
  • S’assurer que les organisations de la société civile puissent exercer, sans ingérence injustifiée, leurs missions régaliennes et rechercher les moyens financiers et matériels dont elles ont besoin dans le cadre de leur travail ;

De façon spécifique :

  • Réviser le Code de la presse de 2017 afin d’assurer la conformité de la législation sénégalaise avec les meilleures pratiques et normes internationales en matière de liberté d’expression. Abroger les dispositions restrictives, y compris les articles 78 et 192 et dépénaliser les délits de presse ;
  • Réformer la législation sur la diffamation conformément à l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ;
  • Veiller à ce que les journalistes et les écrivains puissent travailler librement et sans crainte de représailles s’ils expriment des opinions critiques, dans les limites de l’intérêt et de la sécurité nationale ;
  • Permettre aux blogueurs, journalistes et autres utilisateurs de l’Internet de jouer pleinement et activement leur rôle dans la promotion et la protection des droits de l’homme ;
  • S’abstenir de tout acte qui viole les droits des défenseurs des droits humains dans le cadre de l’exercice de leurs missions ;
  • Protéger les défenseurs des droits de l’homme contre les abus par des tiers en raison de leurs activités en faveur des droits et, ce faisant, agir avec la diligence voulue ;

Prendre des mesures concrètes pour promouvoir la pleine réalisation des droits des défenseurs des droits de l’homme, y compris leur droit à défendre les droits de l’homme en adoptant une loi relative à leur protection conformément à la résolution 27.31 du Conseil des droits de l’homme ;

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