Quelles perspectives s’offrent à un jeune en milieu carcéral ?
La Commission jeunes d’Amnesty International Sénégal a organisé le mercredi 27 décembre 2017, un panel sur la réinsertion des jeunes détenus. Une centaine de jeunes militants ont pris part aux échanges dans l’optique d’affiner encore plus les prestations qu’ils peuvent fournir en solidarité avec leurs semblables en prison.
Le thème “Quelle perspective pour les jeunes en milieu carcéral” a été traité par un panel pluridisciplinaires composé de Mme Thioune Sokhna Fatou Mbaye, directrice de la Maison d’Arrêt et de Correction pour mineurs de Hann ; Seydi Gassama, Directeur d’Amnesty International Sénégal ; Ibrahima Sall, Président de l’Association pour le Soutien et la Réinsertion des Détenus et Djiby Diakhaté, sociologue.
La Directrice de la prison pour mineurs a d’emblée déclaré que la maison d’arrêt et de correction n’était pas surpeuplée. Pour une capacité de 100 places, la MAC enregistre une population carcérale de 81 personnes, âgés de 13 à 18 ans. En prison, diverses activités sont proposées aux jeunes détenus notamment sur le plan de l’éducation et de la formation. C’est ainsi que des cours de supports en anglais et en français sont dispensés en parallèle à des cours d’alphabétisation au niveau de la bibliothèque de la prison.
La formation professionnelle est également présente pour les métiers de la plomberie, la cordonnerie et l’élevage de poules. Diverses structures notamment la Sénégalaise Des Eaux ou l’ONG Tostan apportent leurs soutiens dans cet apprentissage. Il reste que le suivi de ces jeunes, une fois sortie de prison n’est pas encore réellement pris en compte dans la politique de l’administration pénitentiaire, réforme à envisager sans doute.
Monsieur Ibrahima Sall a attiré l’attention du public sur l’assistance fournie par son association et a insisté sur le taux de récidive qu’il situe à 68%. Cela signifie donc que la réinsertion n’a pas encore atteint un objectif appréciable. Les activités génératrices de revenus ne bénéficient qu’à 2% environ de la population carcérale.
En tant qu’association de soutien à la réinsertion, ASRED essaie d’accompagner les anciens détenus pour des activités dans le petit commerce et la vente au détail par l’allocation de petits montants. Ce soutien va également aux familles des détenus notamment à l’occasion de baptêmes des enfants lorsque le père est en détention.
Dans son intervention, le sociologue Djiby Diakhaté est revenu sur l’historique des prisons au Sénégal notamment leur implantation avant l’indépendance. La mise à l’écart existait bien évidemment dans nos sociétés traditionnelles avec le phénomène de la marginalisation. La “prison ouverte” a donc laissé la place à la “prison fermée” pour permettre notamment au colonisateur d’enfermer les récalcitrants à son autorité. Par conséquent, la réinsertion n’était pas la priorité, l’accent était plutôt mis sur la punition.
La dignité du détenu doit pourtant être reconnu parce que tout membre de la société peut y séjourner. Le plus important reste cependant la préparation de la réintégration et à ce niveau, il faut accorder une attention plus soutenue aux jeunes qui sont en détention mais veulent se lancer dans l’entrepreneuriat une fois libéré de la prison. Le jour où les anciens détenus seront mieux préparés avec de bonnes capacités d’insertion dans le monde du travail, ils auront des ressources financières et la réinsertion s’en trouvera davantage facilitée.
Les débats qui ont suivi les échanges ont porté sur le rôle de l’Etat, de la société et des entreprises publiques et privées dans le soutien aux jeunes en milieu carcéral. Ils ont relevé pour la plupart et sur la base d’exemples concrets, les rejets que les détenus doivent affronter dans leur milieu social et familial. Ils sont également revenus sur l’engagement pris par l’Etat du Sénégal de mobiliser 30 milliards de F CFA pour la reconstruction de nouvelles prisons et l’amélioration des conditions des détenus, promesses faites au lendemain de la mutinerie à la prison de Rebeuss.